2
Ne va nulle part sur un cheval ailé

 

Au-dessus de la Ville de la Déesse-sur-Terre, le soleil se couchait. C’était là un soleil bleu et son coucher était lilas et non pas rose. Les sept lunes de la Ville se levèrent alors et commencèrent leurs dessins tintinnabulants sur l’éther.

Une huitième lune, une roue argentée, avait déjà roulé jusqu’à son emplacement nocturne au-dessus de la tour la plus élevée du palais d’Ajriaz la Déesse. A cette roue était accrochée une silhouette minuscule qui hurlait piteusement sans s’arrêter. Ces cris étaient si souvent entendus que même les citoyens les prenaient pour la lamentation d’un oiseau de nuit.

Quant à Ajriaz, elle était assise sur le toit en terrasse dans un trône de verre taillé, gardée de part et d’autre par un chat de pierre blanche, chacun étant animé et l’un d’eux étant occupé à sa toilette.

Tout près se tenaient les sentinelles de la garde de la Déesse, des membres de sa cour et des créatures fantastiques qui n’étaient peut-être pas réelles.

Ajriaz leva les yeux dans le ciel étrange. Elle était vêtue de rouge foncé et de sa beauté. Cela suffisait.

Soudain, une explosion se produisit à quelques pieds au-dessus du toit. Après l’éclair blanc, une ombre rémanente y fut imprimée, qui commença alors à s’ouvrir comme un fruit. Si certains furent stupéfaits, cela ne parut pas être le cas de Ajriaz. N’oublions pas qu’elle avait déjà été courtisée par huit Vazdru.

Hazrond (d’une beauté presque sans égale et revêtu de presque toute la magnificence de la nuit) sortit de l’air pour marcher sur le toit. Au bout d’une corde en argent, il tenait une bête merveilleuse. C’était un cheval dans toutes ses proportions, noir comme le satin noir, avec une crinière et une queue d’eau noire qui coulait, tressée de grandes perles rondes et de saphirs liquides. Au garrot, le satin se transformait en duvet. Tandis qu’il s’avançait, des plumes noires s’étendirent en une paire d’ailes en éventail couleur bleu nuit.

Hazrond se planta devant Ajriaz.

— Le monde entier parle de ta beauté, fit-il, mais il n’est pas suffisamment loquace.

— Tu es trop aimable.

— Non, je ne suis jamais aimable. Mais je suis ici et voici le présent que je te fais.

Ajriaz considéra la créature arrêtée en équilibre sur le ciel nocturne.

Elle répondit enfin :

— Alors, tu m’as apporté un oiseau avec un corps de cheval.

Hazrond eut un sourire.

— Oui, très belle et très nocturne Ajriaz. Un oiseau avec un corps, une tête, des membres, des sabots, une crinière et une queue de cheval. Peut-être... un cheval avec des ailes. (Il se tourna et détacha la longe.) Lève-toi et vole, dit-il au premier enfant de la jument.

Le cheval foula la terrasse de ses délicats pieds d’acier. Il s’éleva d’un bond et d’une poussée de ses ailes, comme soulevé par le haut grâce à des chaînes invisibles. Il vira au-dessus de leurs têtes, bordé et découpé par la lumière des lunes. Il virevolta sous la roue d’argent.

— Qu’est-ce qui hurle là-haut ? voulut savoir Hazrond.

— La fille de celui qui était roi de ce pays avant moi, répondit Ajriaz.

Le cheval ailé passait et repassait comme un coup de dague, un vent du sud. Il redescendit en planant vers le toit, pareil à une plume noire.

— Ne veux-tu point monter ce destrier et chevaucher à travers les cieux ? dit Hazrond à Ajriaz.

— Lorsque je désirerai un tel voyage, j’aurai d’autres moyens à ma disposition.

— Ajriaz, dit Hazrond d’une voix caressante, déjà assis à ses genoux, quels qu’ils soient, tu ne pourras égaler ce cheval. Car c’est une créature qui est née, bien que je l’ai créée à partir de mon admiration et de mon désir. Elle possède l’idéal en matière d’états et de formes, étant à la fois terrestre et magique. Par son charme, elle est ton complément. Tes ténèbres et ta pâleur argentée reposeraient sur ce haut-fond de noir, pareilles aux lis noirs et blancs sur un fleuve éclairé par la lune. Nul n’a chevauché cet animal. Pas même moi. Monte, ce cheval pour la première fois et fais tienne cette créature.

Ajriaz se leva. Les parfums flottèrent à partir de sa robe et de ses cheveux. Elle s’approcha du cheval et lui toucha le nez. Les joyaux dans sa crinière retombèrent sur ceux des tresses d’Ajriaz lorsqu’il pencha la tête vers son front.

— Mon tout beau, murmura-t-elle, si ce n’était que de toi, tu pourrais m’appartenir. Mais tu appartiens à lui. Tu ne peux donc être à moi.

Hazrond se leva aussi. Les chats de pierre blanche grognèrent doucement.

— Madame, se peut-il que tu repousses mon cadeau ?

— C’est toi que je repousse. Le reste s’ensuit.

Hazrond s’enveloppa dans sa cape comme dans une vague d’encre. Dans ses yeux se trouvaient des choses qu’il vaut mieux ne pas répéter. Il avait tellement cerné et purifié cette heure par le pouvoir et la volonté que le cheval magique en fuma, la nuit en grouilla et vibra. Elle répéta cependant son Non. Sa propre volonté, repoussée, revint à Hazrond comme le tranchant d’un fouet.

— Tu flirtes trop sérieusement, dit-il. Je risque de te croire.

— Fais.

— Tu te punis toi-même, Ajriaz, en te laissant aller à ta colère. Tu te voles.

— Je me rappelle un adage qui dit quelque chose de la sorte : Ne va nulle part sur un cheval ailé, car de tels stratagèmes te trahiront.

Hazrond fronça les sourcils. (Le toit était bizarrement désert, les chats étaient accroupis et des étincelles leur sortaient de la gueule.)

— Le proverbe n’est point tel que tu le dis.

— Hélas, en es-tu sûr, ténébreux seigneur ? fit Ajriaz en lui souriant. (C’était un sourire qui eût mis un gel mortel sur le moindre bourgeon d’amour.)

Ajriaz toucha alors des lèvres le pétale de lis noir de l’oreille du cheval.

— N’appartiens à personne.

Se raillant du prince Vazdru, Ajriaz, cygne noir aux ailes puissantes, s’éleva du toit et s’enfonça dans le ciel.

Hazrond prononça une malédiction, l’air se ratatina et il en jaillit une grêle de flammes.

Hazrond claqua des doigts. Lui et son présent s’évaporèrent.

Les chats de pierre restèrent pétrifiés, hormis leurs queues de pierre qu’ils agitaient avec un bruit abrasif.

En haut du ciel, la fille du roi sur sa roue, obsédée par son tourment, continuait de pousser ses cris aigus.

 

Il était un pays au bord du Royaume divin d’Ajriaz et, comme c’était l’habitude dans de telles régions, sa proximité avec cet empire l’avait rendu bizarre. Une montagne se dressait là, dont le centre s’était réduit à une mince tige ; elle était assez étroite pour que vingt hommes pussent en faire le tour avec leurs bras... pourtant la tige s’élevait à plusieurs centaines de pieds. Au sommet, la pierre de la montagne s’évasait statiquement en un grand parasol de granit dont l’ombre qui retombait sur le sol en faisait un lieu avare d’été et innocent de plein soleil.

A la base de la tige de la montagne se trouvait une ville de pierre. Elle avait une large rue dominée par un temple bleu dédié à la Déesse. Nuit après nuit, étouffé par l’ombre de la cime, un jeune prêtre venait méditer sur le toit en terrasse de ce temple. Il fixait le ciel de pierre sans étoile au-dessus de lui.

— Telle est la menace omniprésente des dieux, commentait le jeune prêtre, Pereban, en citant l’enseignement du temple. (Puis il fixait l’horizon sous le rebord de la montagne.) Tel est donc le faux espoir dont se bercent les hommes, concluait-il respectueusement.

Pereban, bien que mortel, était beau et ses cheveux étaient de l’or le plus clair et le plus lunaire qui fût. Mais, dans la couverture mentale de cette ville, ce genre de choses passaient rigidement inaperçues, hormis par leur inconséquence. Car la vie n’était qu’une série de pièges, qui ne devaient être ni appréciés ni fêtés. Les dieux châtiaient le plaisir tout comme ils ignoraient la souffrance.

Ayant trouvé en soi une profonde aspiration, Pereban l’avait prise pour un désir religieux. Il était entré au temple et s’était voué à l’adoration de la Déesse. Par la suite, sa statue (un bloc de pierre grossier avec des taches de peinture en guise d’yeux et de la laine noire représentant la chevelure) l’avait à ce point déçu qu’il s’agenouillait devant elle et se fouettait régulièrement tous les matins.

Mais c’était pour l’instant la nuit, et la lune solitaire de la terre venait d’apparaître, naissant à l’ouest au-delà du sinistre parasol de la montagne.

— La lune ne fut-elle point la mère de la Déesse de la Ville ? continua le jeune prêtre qui se parlait souvent... car qui l’eût écouté. Ou bien ne fut-elle pas l’enfant de la lune et du soleil... Naturellement, elle est bien plus belle que n’importe quelle statue. Peut-être devient-elle la lune elle-même. Peut-être est-ce son pâle visage parmi les étoiles si lointaines.... Ajriaz en robe sombre qui chevauche dans le ciel sur une bête ailée... Ah !

Envahi de mépris devant ses propres rêves intolérables, il jeta sa robe et prit une touffe de piquants pour se battre une nouvelle fois... lorsque se produisit une interruption.

Hazrond passait à travers un élément de l’intérim séparant le monde de la Terre Inférieure lorsque la conscience aiguë de sa propre race entendit, de quelque manière psychique, les paroles du prêtre. Elles étaient tellement à propos et, disons-le, tellement ironiques, qu’elles surprirent Hazrond comme s’il venait d’être giflé. Il perça hors de l’intérim la seconde suivante. Il se trouva ainsi sur le toit du temple sous la montagne, tel une statue mais parfaitement sculptée, considérant celui qui venait de prononcer ces mots de ses yeux brillants d’un feu noir et funeste.

Pereban lâcha son fouet de piquants, comme il se devait.

— Qu’as-tu dit ? demanda Hazrond d’une voix qui était une musique assassine.

— Je... j’ai oublié, dit le prêtre tout à fait honnêtement. (Il s’écroula à genoux et ajouta :) Tu es l’un des dieux. Tu ne peux être rien d’autre. Sans nul doute désires-tu me tuer. Je mourrai dans la félicité, car je t’ai vu.

Car, s’il avait appris à se montrer obtus, Pereban était par nature astucieux. D’ailleurs, il fallait plus qu’une ombre mentale pour ternir l’éclat d’un Vazdru.

Quant à Hazrond, il ne fut pas mécontent. Sensible à la flatterie et à la beauté, comme tous les démons, il considéra le jeune prêtre respectueux, noir comme l’ivoire, seuls ses cheveux dorés et quelques rayures argentées dues à ses anciennes flagellations le recouvrant, et fit remarquer :

— Oui, tu as intérêt à oublier ces paroles. Je vois que tu es un Sivesh ou un Simmu[1]. Ton absence d’enseignement ne t’a point appris ces noms. Peu importe. Tu penses que je suis un dieu. Je vais t’avouer, dit Hazrond en caressant nonchalamment la chevelure dorée, qu’une vipère femelle vient de refermer ses crocs sur moi et qu’une guêpe m’a piqué. Es-tu la fleur médicinale qui me guérira de ces blessures empoisonnées ?

Le jeune prêtre avait fermé les yeux sous la caresse du Vazdru. De toute sa vie, jamais la religion ne l’avait à ce point ému. Mais :

— Non, dit Hazrond avec un brin de regret. Tu ne suffis pas, toi qui es né de la terre, pour me guérir. Une nouvelle fois, peu importe. Tu m’as distrait un moment de la rage de ce venin. Je vais te récompenser. Que veux-tu ?

En réponse à cette question, Pereban leva ses yeux brillant d’une émotion inqualifiable et se noya dans le regard de Hazrond. Mais à cet instant le mortel ne put parler, ne put rien dire.

— Très bien, fit Hazrond. Je vais t’accorder ce que tu désires le plus et que tu ne connais point ainsi que ce que tu exprimais lorsque tu as attiré mon attention. Un paradoxe, assurément. Le présent est dangereux, mais tu as également gagné le droit de courir ce risque.

Hazrond s’écarta alors et jeta un coup d’œil dans les ténèbres, d’où sortit au trot, dans un frissonnement d’incandescence, le cheval ailé.

— Voici mon présent, répéta Hazrond tandis que le jeune homme regardait fixement, tantôt le prince, tantôt la bête magique.

Hazrond n’avait pas entendu (à moins qu’il ne l’eût entendu) le chuchotement qu’elle avait glissé dans l’oreille de la créature : « N’appartiens à personne. »

Pereban, lui, ne l’avait pas entendu, assurément.

Il se leva et marcha dans une espèce de rêve. Le cheval, paillettes d’ébène et de braises froides, le laissa faire. Le cheval était doux, ou plutôt possédait la même sorte de pureté générale qu’un tigre. Il était au-dessus et au-delà du péché et de la vertu, il les ignorait.

Pereban se tourna alors pour remercier et louer le dieu qui l’avait ainsi béni. Mais Hazrond avait disparu, il était déjà à des milles (Pereban s’en était rendu compte) sous ses pieds dans les allées de la toujours radieuse Druhim Vanashta.

Le prêtre dut se débarrasser d’une prière en toute hâte, car il désirait monter immédiatement sur le cheval ailé. C’était une folie qui l’habitait, en partie enflammée par le contact du Vazdru et par une ancienne aspiration secrète qui n’avait encore jamais pu s’exprimer. La liberté.

Enfant, Pereban était parfois monté sur les mulets de la ferme de son père. Il pensa ne pas avoir perdu l’habitude et, ayant caressé et cajolé un instant le cheval, se saisit de la crinière de joyaux, posa le pied contre le flanc de satin et bondit sur son dos. Il y eut un instant de maladresse, car les ailes du cheval commençaient là où est censé s’asseoir un cavalier normal. Le cheval ne discuta pas et resta parfaitement immobile, ce qui permit à Pereban de remonter plus haut sur le garrot. Du fait des gros muscles qui s’étendaient vers les ailes, celui-ci était indubitablement assez robuste pour le soutenir. Il les sentit remuer et glisser sous ses cuisses lorsque les ailes remuèrent leurs deux éventails de cour.

Il enlaça le cou du cheval de ses bras d’adorateur.

— Mon tout beau... partons !

Ce fut tout le commentaire qui accompagna la découverte de son désir secret de s’enfuir.

Le cheval ailé, saisissant l’intonation de vérité, lui obéit.

Comme un oiseau de feu noir, comme une lance de lumières... ils se précipitèrent dans les airs.

Pereban poussa un cri, mais il s’accrocha au cheval, les doigts noués dans sa crinière, les jambes serrées de part et d’autre de son cou. Mais il éprouva aussi une vague de terreur, malgré qu’il se crût le maître de la créature, car ils avaient déjà dépassé la hauteur de plusieurs grandes tours. Assez vite, la cime de la montagne apparut au-dessus de lui et Pereban put en distinguer les veines et les cristaux bizarres et apercevoir en bas les habitations de poupées de la ville. Il ne connut plus que la victoire.

Le cheval était propulsé par l’énorme battement de ses ailes d’aigle, de telle sorte qu’ils filaient dans une sorte de tourbillon créé par celles-ci. Bientôt la montagne retomba en arrière et ils furent dans le ciel.

Qu’il était énorme, ce ciel. Après l’espace confiné de la ville, Pereban avait l’impression d’être mort et de s’être dépouillé de tout objet charnel, de ne faire plus qu’un avec son cheval, n’étant plus que son âme. Le ciel n’était pas noir mais d’un indigo transparent, plein de vagues et de courants comme la mer. Les nuages passaient, gazes en forme de lune éclairées par la lune ; chacun avait une odeur différente, de pluie, de la terre dont ils s’étaient élevés, d’énergie et aussi d’étoiles. Les étoiles elles-mêmes semblaient accompagner le cheval dans sa course, parfois en flots semblables à des colliers de diamants, ou alors restant au même pas, ou encore immobiles comme des perles d’eau sur le toit du ciel.

La terre en dessous s’était rapidement perdue. Elle était désormais aussi mystérieuse que l’était généralement le ciel, dissimulée par les vapeurs et les ténèbres. Çà et là, les lampes des villes lançaient en l’air une sorte d’empourprement de pâleur. Çà et là, un dragon amorphe faisait ondoyer ses écailles ternes... océan puissant agité par ses marées.

— Continue d’avancer, cher amour ! cria Pereban au cheval, enivré, ne craignant plus rien. Caresse les étoiles de tes ailes.

Obéissant sans être servile, le cheval continua de grimper à toute allure, plus rapide que toute bête ou tout oiseau du monde.

Ils pénétraient maintenant dans la portion du firmament au-dessus de laquelle la lune suivait sa route vers l’occident. Plus haut s’étendait l’interminable tapisserie des étoiles, mais la lune était plus proche de la terre que celles-là et elle se déplaçait, ce qu’elles ne faisaient point. Elle était aussi presque pleine. Son disque semblait vaste, emplissant un quartier du firmament supérieur, et elle brûlait sur le cheval et son cavalier d’une blanche fulgurance qui émettait aussi une grande chaleur.

Pereban n’avait jamais songé que la lune fût brûlante, mais plutôt fraîche ou froide. Dans sa rêverie poétique, il l’avait comparée au visage délicat de la Déesse... Il contemplait aujourd’hui son cercle colossal et son éclat inflexible commençait à agir bizarrement sur lui.

Car, tandis qu’ils se déplaçaient sous la lune, les ailes du cheval se mirent à battre de plus en plus vite, au rythme du cœur du jeune homme, et les muscles ronds qui peinaient sur le dos, le garrot et le cou produisirent une nouvelle sensation chez le cavalier. A chaque battement d’aile-cœur, tandis que le monde s’éloignait de plus en plus et que l’éclat de la lune les embrassait de plus en plus, cette sensation s’amplifiait. S’il s’était trouvé dans son temple et que cette sensation l’eût envahi, il eût saisi le fouet d’épines, car il était toujours resté absolument chaste. Mais il n’avait pas le fléau à portée de main. Uniquement la peau soyeuse, l’éventail incessant des ailes... qui, de temps à autre, doux comme un baiser taquin, posait la pointe d’une plume sur ses épaules, son dos ou son flanc.

Pereban s’installa donc de son mieux et décida de ne prêter attention qu’au miracle de cette nuit et à son aventure.

Mais une caresse Vazdru s’était posée sur lui, la lune le chauffait à blanc et attirait en lui le sang comme la mer, flux et reflux incessant. Quant au cheval (mais il l’ignorait), il était tellement plongé dans la magie charnelle que seules sa naïveté et la nature inhabituelle des événements l’en protégeaient jusqu’alors. Protection qui cessa soudain.

Cela n’avait rien d’habituel de contempler les étoiles ou la terre informe. Malgré tous ses efforts, il ne pouvait qu’avoir conscience de la manière dont le moteur du cheval palpitait et luttait contre lui et dont les ailes le cajolaient et le frôlaient. Assurément, il n’existait aucun moyen de redescendre : il semblait se trouver à des milles dans les airs et les étoiles passaient à toute allure...

Par la suite, Pereban ne put rien faire d’autre que s’allonger sur le cou du cheval, crisper les mains dans la crinière de cheveux féminins, soupirer, gémir et soupirer encore. Il ne tarda pas à trembler et ses yeux se fermèrent. Peu de temps après, il s’étira et chanta très fort, de telle sorte que le ciel aurait pu être stupéfait.

Mais à cet instant, le cheval ailé, engendré, ne l’oublions pas, grâce à un démon, se secoua, tel un tigre. Ce fut une belle secousse parfaite.

Toujours allongé dans l’oubli de son accès de joie, Pereban fut projeté dans l’espace.

Et il tomba...

Les sortilèges de la nuit
titlepage.xhtml
Lee,Tanith[Le dit de la Terre-Plate-5]Les sortileges de la nuit_split_000.htm
Lee,Tanith[Le dit de la Terre-Plate-5]Les sortileges de la nuit_split_001.htm
Lee,Tanith[Le dit de la Terre-Plate-5]Les sortileges de la nuit_split_002.htm
Lee,Tanith[Le dit de la Terre-Plate-5]Les sortileges de la nuit_split_003.htm
Lee,Tanith[Le dit de la Terre-Plate-5]Les sortileges de la nuit_split_004.htm
Lee,Tanith[Le dit de la Terre-Plate-5]Les sortileges de la nuit_split_005.htm
Lee,Tanith[Le dit de la Terre-Plate-5]Les sortileges de la nuit_split_006.htm
Lee,Tanith[Le dit de la Terre-Plate-5]Les sortileges de la nuit_split_007.htm
Lee,Tanith[Le dit de la Terre-Plate-5]Les sortileges de la nuit_split_008.htm
Lee,Tanith[Le dit de la Terre-Plate-5]Les sortileges de la nuit_split_009.htm
Lee,Tanith[Le dit de la Terre-Plate-5]Les sortileges de la nuit_split_010.htm
Lee,Tanith[Le dit de la Terre-Plate-5]Les sortileges de la nuit_split_011.htm
Lee,Tanith[Le dit de la Terre-Plate-5]Les sortileges de la nuit_split_012.htm
Lee,Tanith[Le dit de la Terre-Plate-5]Les sortileges de la nuit_split_013.htm
Lee,Tanith[Le dit de la Terre-Plate-5]Les sortileges de la nuit_split_014.htm
Lee,Tanith[Le dit de la Terre-Plate-5]Les sortileges de la nuit_split_015.htm
Lee,Tanith[Le dit de la Terre-Plate-5]Les sortileges de la nuit_split_016.htm
Lee,Tanith[Le dit de la Terre-Plate-5]Les sortileges de la nuit_split_017.htm
Lee,Tanith[Le dit de la Terre-Plate-5]Les sortileges de la nuit_split_018.htm
Lee,Tanith[Le dit de la Terre-Plate-5]Les sortileges de la nuit_split_019.htm
Lee,Tanith[Le dit de la Terre-Plate-5]Les sortileges de la nuit_split_020.htm
Lee,Tanith[Le dit de la Terre-Plate-5]Les sortileges de la nuit_split_021.htm
Lee,Tanith[Le dit de la Terre-Plate-5]Les sortileges de la nuit_split_022.htm
Lee,Tanith[Le dit de la Terre-Plate-5]Les sortileges de la nuit_split_023.htm
Lee,Tanith[Le dit de la Terre-Plate-5]Les sortileges de la nuit_split_024.htm
Lee,Tanith[Le dit de la Terre-Plate-5]Les sortileges de la nuit_split_025.htm
Lee,Tanith[Le dit de la Terre-Plate-5]Les sortileges de la nuit_split_026.htm
Lee,Tanith[Le dit de la Terre-Plate-5]Les sortileges de la nuit_split_027.htm
Lee,Tanith[Le dit de la Terre-Plate-5]Les sortileges de la nuit_split_028.htm
Lee,Tanith[Le dit de la Terre-Plate-5]Les sortileges de la nuit_split_029.htm
Lee,Tanith[Le dit de la Terre-Plate-5]Les sortileges de la nuit_split_030.htm
Lee,Tanith[Le dit de la Terre-Plate-5]Les sortileges de la nuit_split_031.htm
Lee,Tanith[Le dit de la Terre-Plate-5]Les sortileges de la nuit_split_032.htm
Lee,Tanith[Le dit de la Terre-Plate-5]Les sortileges de la nuit_split_033.htm
Lee,Tanith[Le dit de la Terre-Plate-5]Les sortileges de la nuit_split_034.htm
Lee,Tanith[Le dit de la Terre-Plate-5]Les sortileges de la nuit_split_035.htm
Lee,Tanith[Le dit de la Terre-Plate-5]Les sortileges de la nuit_split_036.htm
Lee,Tanith[Le dit de la Terre-Plate-5]Les sortileges de la nuit_split_037.htm